Photo :Young native american by Edward Curtis, 1905 , National library of Congress, USA.
"Ceux à qui l'on a volé leur enfance ne peuvent jamais connaître de sentiment d'apaisement et de sérénité que l'on apparente le plus souvent au bonheur. Leurs parents ne sont pas toujours des êtres monstrueux dépeints dans les contes. Mais simplement des êtres ordinaires qui n'avaient pas assez d'énergie vitale à offrir, et peut-être l'enfant occupé à lutter n'avait -il pas assez de force pour la leur quémander.
Ce n'est donc pas tant la monstruosité qu'il faut craindre mais l'incapacité à hisser vers le bonheur un enfant. Pour ces êtres floués au départ, le besoin de consolation est immense; or la societé, peu apte à évaluer la souffrance, incapable d'admettre la masse de frustration qu'elle génère pour ceux qui n'y sont pas bien nés, n'aura de cesse de les rejeter comme l'océan broie les plus frêles esquifs dans la tempête. Ainsi que l'écrivait Appolinaire ' ouvrez-moi cette porte où je frappe en pleurant', mais les gonds sont scellés comme jadis les paroles de réconfort ne pouvaient être prononcées. Et la porte se referme sur un coeur sec qui bat en pure perte, se recroqueville sur ce que l'imagination peut offrir: un abri dans l'oeil du cyclone, un temps suspendu, balancelle qui se joue à chaque souffle des filets de la mort.
Tel est le pouvoir des rêves pour celui qui ne possède rien et n'aspire à rien moins que devenir un être humain mais ce pouvoir là est si immense et si indestructible que mille armées ne sauraient l'abattre".
Anonyme.